1 février 2014

La Pieta Rondanini L'oeuvre ultime.

Il faut parcourir maintes salles, croiser des foules de Madones, des Saints en saintes conversations, des chevaliers en armure, un diable  sortant de sa boîte  avant de trouver la salle. Il faudra traverser une forêt de marbres, statues et gisants, avant de découvrir l'écrin qui l'isole de ce monde de l'achevé car elle est d'une autre nature, marbre à l'état de sable, flocons de neige sur fond de crépuscule, faible croissant de lune sous dans un ciel sans étoiles, elle est l'inachèvement, l'image de l'impuissance, de l'épuisement  de la création.
Lui, un scénographe un rien sadique a placé sa tête tourmentée sur une maigre étagère, sculpteur sans corps, sans bras, réduit à contempler l'oeuvre qu'il n'a pas, n'a pu achever.





Nous sommes en ces premiers  jours  de février 1564, l'hiver est rude même à Rome, il est vieux, il est seul, il a vu partir ses amis, son fidèle serviteur Urbino, il souffre de la terrible maladie qu'est la vieillesse,  le corps devient rebelle à la pensée refusant l'action. Pourtant cette nuit encore il coiffe  son étrange chapeau  de carton munie d'une bougie et se campe devant ce couple mère et fils, lui gisant glissant vers le tombeau elle le soudant à son corps comme dans un ultime refus de l'inéluctable.  Cette oeuvre ornera son tombeau puisqu'il a brisé la précédente par dépit, de rage de ne plus pouvoir, de ne plus savoir.


Il hésite, il ne sait plus,  il ne peut plus, il est loin le temps ou il faisait bondir des corps captifs triomphant du marbre, il travaille un peu ce torse sans muscles, cette tête qui lui ressemble puis abandonne. Elle restera ainsi étrangement émouvante.  
Le doigt divin de la Sixtine pince la flamme de la vie, s'élève une volute de fumée : Pièta dernière oeuvre de Michel-Ange.