5 juin 2016

Je vois Giorgione partout


Dans "Se perdre dans Venise" René Huygue écrit à propos de Giorgione : Il fait passer la peinture de ce qui se voit à ce qui se sent et à ce qui se sent en soi-même et en soi seul...  Puis de La tempête : Ce qu'il y a évidemment de magnifique et de surprenant dans un tableau comme celui-là, c'est qu'on peut perpétuellement rêver devant lui et se demander quel en est le contenu intérieur, quel mystère l'habite... Quelle que soit l'interprétation, ce qui compte, c'est précisément ce pouvoir de rêverie qui émane du tableau ; on y pressent le secret du peintre lourd de ses songes, mais ils émeuvent en nous des songes fraternels.


En prenant cette photo j'étais bien loin de penser à Giorgione et à ce tableau  fascinant, admiré et interrogé encore cette semaine et pourtant je trouve qu'elle traduit les mêmes réflexions, qu'elle pose les mêmes questions sur la vie le temps qui passe... un jeune couple dans la gondole exprimant le bonheur d'une vie à son zénith qui vogue vers son destin, l'immobilité du vieil homme perdu dans ses pensées  au crépuscule de la vie. Que transmet-il à ses deux petites filles, sans doute la connaissance et l'amour de la beauté de Venise. Des existences qui se croisent et s'ignorent.  Certainement la photo la plus émouvante de ce voyage.