17 octobre 2009

La vie n'est pas un long fleuve tranquille

 J'avance peut-être un  peu vite en publiant cet article paru dans le journal de l'hôtellerie il y a fort longtemps, sans doute dans les années 50. On revient encore à Alfred Maury. Combien de clients m'abordaient en disant Mr Maury votre grand père a fait mon baptême, ma communion, mon mariage ; parfois il avait fait les trois ! Ma mère disait :" plus c'était compliqué, plus il était heureux" Son activité de traiteur l'amenait dans les châteaux de Dordogne mais aussi dans le Bordelais ou en Charente.  La qualité de la table de l'hôtel de Bordeaux avait été récompensée par un macaron Michelin ce qui avait apporté un surcroit de notoriété. On venait y gouter le lièvre à la Royale et la lamproie à la bordelaise ou les croustades de truffes Une de ses créations, le coeur d'artichaut à la Villeroy  est resté à la carte pratiquement jusqu'à la vente de l'hôtel. Je l'avais rebaptisé Alfred Maury mais pour les Bergeracois il restait Villeroy. Facile a transporter, pouvant attendre au chaud, c'était le plat à emporter idéal.  Très actif dans le monde syndical hôtelier il fréquentait les grands nom de la gastronomie du Sud-ouest : la "Mère" Oliver à Langon plus tard, son fils Raymond Oliver qui passait de temps en temps voir mon père . Je me souviens de son dernier passage, personnage très médiatisé par la télévision , il avait , pour être tranquille,  déjeuné seul dans une salle non utilisée ce jour la et m'avais dédicacé le premier livre de cuisine de ma collection : la cuisine pour les hommes, petit précis de cuisine pour un jeune célibataire! Les Darroze à Villeneuve de Marsan, jeune marié, j'y ai diné un soir rentrant d'une corrida. Monsieur Darroze n'exerçait plus mais était toujours là et a évoqué avec beaucoup de gentillesse leurs souvenirs communs .
La vie était mouvementée et heureuse . Mouvementée comme cette veille de mariage en charente au château de C où mon grand-père était arrivé dans l'après-midi avec  matériel et personnel. Beaucoup de choses étaient préparées à l'avance à Bergerac, c'était le cas du consommé qui ouvrait souvent les agapes. Donc ce soir la après avoir passé en revue toutes ses victuailles Alfred s'installe dans un coin de la cuisine du château pour un diner rapide. Bazile, l'apprenti  a été chargé du café.   Il en a fait un peu trop, on va donc le garder pour le petit déjeuner . Mets le dans la casserole qui est sur le fourneau lui dit Alfred et la, catastrophe, Bazile se trompe et verse le café dans le grand rondeau où fini de réduire le consommé... il y en avait pour plus de 100 personnes ! La réaction fût épique et dantesque mais il fallait  réagir vite, impossible de refaire un consommé sur place. Heureusement il y avait le téléphone au château et mon père qui devait arriver le lendemain n'était pas parti, la conversation fut brève : dé..... toi, tu y passe la nuit, mais je veux demain un nouveau consommé  impeccable. Toute la brigade restée à l'hôtel travailla une bonne partie de la nuit et tel Vatel mon grand-père attendit non pas la marée mais le consommé qui arriva juste à temps . Après le repas la contesse vint féliciter le chef lui disant que tout avait été parfait particulièrement le consommé d'une fraicheur incomparable...
Mon grand-père n'en voulu pas à Bazile il était encore là pour mon repas de communion au poste de chef mais n'avait pas oublié cet accident.

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